- du 25 août au 16 septembre 2020 - P.
Le deuxième chapitre de notre voyage relate le récit de notre traversée des Alpes, du petit village de Tessens dans le Beaufortin jusqu'aux portes de l'Italie, au lac Majeur.
Vous apprendrez le départ des vélos migrateurs de la maison familiale savoyarde, leur parcours le long du Rhône jusqu'à sa source en Suisse, à travers défilés, plaines, vallées et lacs, dont le magnifique lac Léman, le franchissement de la chaîne alpine qui sépare la Suisse de l'Italie, et leur arrivée progressive en méditerranée le long de la rivière Tessin.
Difficile de raconter cette aventure si riche en émerveillement : rivières et fleuves tranquilles, torrents et cascades impétueux, vallées colorées de villages et de vignes, lacs aux allures de mers où les cimes se reflètent, et décors de sommets toujours plus élevés…
Sans oublier les nombreuses rencontres sur le chemin, des gens curieux, aux cultures et aux langues variées, toujours prêts à échanger et souvent même à nous accueillir !
Les débuts n'ont pas été des plus faciles. Après deux semaines de repos bien mérités dans la maison familiale, nous prenons le train direction Bellegarde sur Valserine, pour reprendre la route cyclable de la ViaRhona presque où nous l'avions laissée. Après quelques mauvaises péripéties sur une nationale trop empruntée, notre petite équipe coupe sur des pistes à travers forêts et champs et monte peu à peu. Soudain, le Rhône apparait en contrebas, cerné de falaises gigantesques, offrant aux regards un coucher de soleil charmant. Une redoute domine cet escarpement, le fort de l'écluse, donnant son nom au défilé que nous passerons de nuit.
Nous campons à l'autre extrémité du défilé, proche d'un spot de migration pour les oiseaux que nous rejoignons le lendemain, dont les chroniques natures relaterons bientôt les observations.
Le Rhône, plus petit maintenant, devient de plus en plus vert et de moins en moins calme, et serpente une plaine jusqu'à Genève, où nous retrouverons Alexis, un ami tourangeau. La frontière suisse est passée sans encombre malgré l'épidémie, et les premiers changements de culture se font sentir : nous payons en Francs Suisses et entendons l'accent chantant des genevois.
En partant de Genève, une vision magique apparait, le lac Léman. Nous passerons quelques jours à le contempler, prenant notre temps, nous baignant de temps en temps, profitant du soleil de fin d'été. Le village médiéval d'Yvoire nous laissera un souvenir particulier, alors que nous y établissons notre campement pour la nuit, le lever de lune vient éclairer notre tente et illuminer le lac. Les montagnes blanches pâles s'y dévoilent dans un ciel percé d'étoiles. Plus loin le long du lac, les cimes élevées se détachent. Le bon fromage d'abondance et l'eau de source d'Evian nous donnent de la motivation, car à l'autre bout du lac, le Rhône reprend son cours, et nous entrons dans le canton du Valais aux sommets plus escarpés.

De nombreuses rencontres ponctuent notre chemin. Notre attelage éléphantesque de 40kg chacun étonne, et pousse les gens à venir nous parler. Il n'est pas rare lorsqu'on s'arrête même quelques secondes, que quelqu'un vienne nous demander où nous allons et d'où nous venons. C'est l'occasion pour nous aussi de discuter, demander notre chemin et connaitre les choses à voir dans le coin.
Nous nous renseignons ainsi sur la route à suivre, très connue des autres cyclistes. Avec pour objectif de franchir les Alpes pour rallier l'Italie, plusieurs cols sont possibles, il va falloir choisir.
Nous avons aussi pu apprécier l'hospitalité de nombreux locaux, ponctuée de discussions enrichissantes. A Thonon, une personne s'est même arrêtée sur le bord de la route pour nous proposer de dormir chez lui. Une autre fois à Sion, un hôte, absent ce soir là, nous aura même laissé sa chambre dans sa coloc' pour passer la nuit.
Ces contacts humains généreux sont riches et donnent de l'énergie, et nous soutiennent dans les épreuves du voyage. Nous avons beau voyager comme des solitaires, nous sommes loin d'être seuls !
Arrivés dans le Valais, nous fêtons nos 1000km parcourus à vélo, et buvons un coup avec Korab, un ami du lycée, dernière connaissance de notre itinéraire. Le Rhône n'est maintenant qu'une rivière de montagne. Les cascades et torrents s'y jettent et de nombreux villages montagnards le cernent. Le mois de septembre signifiant la rentrée des classes, des floppés d'enfants à vélo nous dépassent parfois en pleine montée. Nous sommes en effet les plus lents sur la route, la plupart des autres vélos sont des cyclistes sportifs et nous croisons que quelques rares autres "sacochards" courageux.
Sion, aux ruelles étroites et sinueuses, sera la dernière ville francophone de notre périple. Une bonne occasion pour Piero de se remettre à l'allemand alors que de nombreux passants viennent nous parler dans la langue de Goethe.
Depuis le début de la Suisse, nous sommes montés progressivement jusqu'à la ville de Brig, située à 600m. Cette ville nous aura marqué : à l'allure typiquement montagnarde, creusée de canaux, les premières maisons sur pilotis, pour éviter que les souris y montent, bordent des ruelles pavées. Au détour de l'une d'elle, une chapelle nous étonne : une crypte ouverte sur l'extérieur y montre un empilement de plusieurs centaines de crânes humains … : charmant !
Nous serons accueillis dans cette ville par des Warmshowers sympathiques, dont les enfants de 6 et 8 ans parlent déjà bien français et allemand. Ils seront de bons conseils pour choisir (enfin) quel col prendre pour franchir la chaîne alpine. Ce sera la traversée du col du Nufenen, épreuve pleine de péripéties dont le récit est conté dans
nos anecdotes, page "coups de cœur".

Après avoir passé une nuit extraordinaire au col du Nufenen, nous nous préparons bien et faisons de longs étirements. En effet, le soir même nous avons rendez-vous chez notre prochain Warmshowers à Bellinzona, à 85 km de là, et surtout 2000 m plus bas. Une longue descente s'opère, pour une étape record en kilomètres, où nous n'appuierons presque pas sur nos pédales. C'est sans doute une des plus belle journée de notre voyage, avec pour commencer une vue sur les sommets et glaciers, puis une traversée des alpages entre sapins et mélèzes, pour enfin longer le fleuve du Tessin bordé de villages colorés au son des "buon' viaggio!" encourageant des autres cyclistes.
Nous avons en effet été conviés le soir à une "big pasta party" chez des hôtes sympathiques, avec 4 autres warmshowers de pays différents. La soirée mélange l'anglais, le français, l'allemand et l'italien, et prend des tournures d'auberge espagnole. Nous continuerons à longer le Tessin jusqu'à une ouverture sur un magnifique lac de montagne, le lac Majeur, pour une dernière vision de la Suisse.
Parce que oui, il fait chaud, les maisons peintes sont riches en ornements, des vignobles aux douces odeurs de fruits rouges nous entourent, les gens dans la rue semblent chanter quand ils parlent et les premiers moustiques commencent à nous piquer : nous arrivons en Italie !
Petit bilan pratique du voyage en Suisse :
Qualité des pistes : une longue piste cyclable longe le Rhône jusqu'à Brig, sauf à quelques endroits où on est sur des routes peu empruntées (par exemple le long du Léman). Un portion dangereuse mais inévitable entre Evian et St Gingolph (20km de route très empruntée, à éviter aux heures de pointe).Au niveau des cols, très fort traffic, méfiance. Ensuite, plus de piste cyclable ! Très bon revêtement presque partout, nous avons pris quelques pistes en montagne pour éviter la circulation. Des transports en commun, bus, trains, mènent un peu partout toute la journée.
Prix de la vie : un peu plus cher qu'en France, on peut s'en tirer pour un prix raisonnable pour l'alimentation. Les transports et quelques denrées comme le café en bar sont beaucoup trop chers.
Rencontres : très riche en rencontres, ce pays est rempli de gens curieux.
Météo début septembre : du soleil tout le temps, sans grosses chaleurs. froid en haut du col du Nufenen à plus de 2000 mais raisonnable autour de 5°.
Ce que nous avons préféré : faire de la balançoire dans les alpages à 1300m d'altitude et le paysage diurne et nocturne depuis le Nufenen !
Ce que nous avons moins aimé : se faire réveiller au petit matin au col du Nufenen par une dame qui tenait la boutique à coté de la tente. Après avoir claqué plusieurs fois ces portières de voiture, nous l'entendons grommeler "Das ist kein Campingplatz!". Pourtant, en sortant en de la tente transits de froid, elle nous sort un Guten morgen cordial et plein d'hypocrisie…
Revivre le voyage en photos :
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